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Matching Numbers : ça vaut quoi niveau juridique ?

Matching Numbers : ça vaut quoi niveau juridique ?

Les amateurs de véhicules de collection ont sans doute vu passer cette mention « Matching Numbers » dans les petites annonces ou dans les colonnes des magazines spécialisés. Certains propriétaires attachent à la concordance des numéros de série une importance capitale et en font un élément majeur au moment de déterminer la valeur d’un véhicule. D’un point de vue juridique cette caractéristique sera-t-elle prise en compte par la justice en cas de litige ? Quelques éléments de réponse avec Jean-Baptiste le Dall Avocat à la Cour, Docteur en Droit.

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Un moindre doute sur cette GTI présentée comme « Matching Numbers »… votre avocat peut vous conseiller

Commençons déjà par le souligner, la notion de Matching Numbers qui fait déjà débat au sein du petit monde des amateurs d’anciennes n’a bien évidemment pas fait l’objet d’une définition juridique par les textes ou par la jurisprudence.

Si l’on devait utiliser cette notion dans le cadre d’une action en justice, on se réfèrera tout simplement au sens que lui donne les spécialistes du véhicule ancien à savoir la concordance, la correspondance entre les différents numéros de série que l’on peut retrouver sur le véhicule.

En termes de numéros, les spécialistes se réfèrent bien sûr au numéro VIN (pour Vehicle Idenitification Number) au numéro de châssis. Ce code VIN à 17 caractères a été normalisé depuis le début des années 80.

Et même avant cette date, il sera bien évidemment possible de se référer à des numéros. L’industrie automobile utilise ce numéro VIN depuis les années 50 aux États-Unis… Avant 1980 et l’arrivée de la norme ISO, chaque constructeur avait recours à son propre format.

Plus le temps passe, plus le véhicule est récent et plus nombreuses seront les références, des numéros de série, des références constructeurs, sont désormais présents sur n’importe quelle pièce du véhicule.

Un véhicule extrêmement ancien aura donc statistiquement plus de chances ou plutôt de risques de présenter des numéros de série parfois différents ou tout du moins non concordants et des pièces dénuées de toute référence.

On parlera quand même de véhicules « Matching Numbers » à partir du moment où ils peuvent a minima présenter une concordance entre un numéro de châssis et un numéro de moteur et éventuellement un numéro de boîte de vitesse.

On comprend évidemment que les puristes rechercheront le caractère originel du véhicule. Dans la pratique, on réalisera assez vite que nécessairement au cours de sa vie un véhicule aura connu un certain nombre de changements de pièces périphériques.

D’un point de vue juridique, il conviendra de distinguer deux hypothèses : une non-concordance entre numéros de série entraînant un défaut de conformité par rapport à une homologation et un véhicule non Matching Numbers mais pour lesquelles les éléments mécaniques correspondent à son homologation.

La non-conformité administrative

On pourra d’emblée envisager le sort du véhicule non « Matching Numbers » qu’un propriétaire aurait cru malin d’équiper d’un moteur un peu plus puissant par exemple.

De façon évidente le véhicule ne pourra plus être considéré comme « Matching Numbers » et surtout il ne correspondra plus aux caractéristiques techniques mentionnées sur ses documents administratifs : carte grise ou certificat d’immatriculation.

Avec cet exemple de changement de motorisation, le véhicule n’est plus conforme à son homologation et il ne peut plus circuler légalement sur les voies ouvertes à la circulation publique. Se poseront également inévitablement des questions assurancielles en cas d’accident avec un tel véhicule.

Les acheteurs de véhicules ainsi modifiés pourront engager une action en justice fondée sur l’obligation de délivrance conforme pour solliciter à la résolution de la vente (pour les amateurs de droit on soulignera que le fait qu’un véhicule soit ou non « matching numbers » ne constitue pas un vice caché en cas de problème, la notion de délivrance conforme est celle qui sera utilisée en justice) . C’est ce qui avait été, par exemple, entrepris en présence d’un Range Rover notamment équipé d’une motorisation exotique devant la Cour d’appel de Douai.

Cour d’appel de Douai, Chambre 1 section 1, 16 décembre 2021

« M. X et Mme Y produisent aux débats de nouvelles pièces et notamment un document interne du constructeur Range Rover répertoriant l’ensemble des éléments du véhicule dont il résulte que le code VIN figurant au niveau du tableau de bord (DH728814) correspond à un véhicule belge, le code VIN figurant sur le pare-brise (SALA2BEXFH000842) correspondant quant à lui à un véhicule d’origine allemande. Par ailleurs, les conclusions expertales selon lesquelles le véhicule litigieux a été reconstruit à l’aide de pièces provenant d’un autre véhicule, sont corroborées par le fait que la fiche de diagnostic d’erreur de code moteur correspond à un véhicule d’origine belge alors que le VIN présent sur le pare-brise correspond à un véhicule d’origine allemande.

Il est suffisamment établi par les pièces produites par M. X et Mme Y que les caractéristiques et l’identité du véhicule litigieux ne sont pas conformes au certificat d’immatriculation ni aux données du constructeur, ce dont il résulte que Mme Z a manqué à son obligation de délivrance conforme. Par ailleurs, alors que le véhicule acquis par M. X et Mme Y présente une incohérence d’identification entre les numéros de série frappés à froid et l’étiquette de pare-brise avec celui indiqué dans le combiné de tableau de bord, il résulte des justificatifs produits aux débats que le moteur qui équipe le véhicule ne correspond pas à celui identifié par le constructeur. Il en résulte que le manquement à l’obligation de délivrance du vendeur apparaît suffisamment grave pour justifier la résolution de la vente »

Conforme à son homologation mais plus « Matching Numbers »

Nous sommes là dans l’hypothèse d’un véhicule équipé du bon moteur, de la bonne boîte de vitesse des bonnes suspensions, du bon dispositif de freinage… le véhicule est donc parfaitement conforme à son homologation néanmoins certains de ces éléments à commencer, par exemple, par le moteur ont été remplacés au cours de la vie du véhicule par le biais d’un échange standard.

Si l’on prend l’exemple d’une Peugeot 205 gti 1,6 l, si un ancien propriétaire à la grande époque du tuning a eu la bonne idée de troquer la motorisation d’origine contre un bloc 1,9 l (plus puissant, on passe de 115 à 130 cv) le véhicule n’est bien sûr pas Matching Numbers et il n’est plus conforme à son homologation.

Si, par contre, le moteur d’origine de ce véhicule conduit par un pilote peu porté sur l’entretien a fait l’objet d’un échange standard avec l’installation sous le capot d’un autre moteur 1,6 l strictement identique à celui d’origine, le véhicule demeure conforme du point de vue de son homologation mais il ne pourra néanmoins plus prétendre à la mention « Matching Numbers » s’il venait à être proposé à la vente. Le numéro de moteur présent sous le capot ne correspondrait plus, en effet, au numéro de châssis.

Le véhicule pourra être assuré sans souci il pourra circuler en toute légalité mais pourrait se poser la question du recours qui pourrait être engagé par un acheteur insatisfait qui viendrait à découvrir que le véhicule qui lui a été vendu n’est pas « Matching Numbers ».

Matching Numbers : du cas par cas

En soi, le fait qu’un véhicule ne soit pas Matching Numbers ne permettra pas véritablement d’espérer une remise en cause de la vente. En réalité tout dépendra de la façon dont les choses ont été présentées.

Si le caractère originel du véhicule a été mis en avant dans la présentation commerciale qui a été faite du véhicule, il pourra t’être plaidé que le fait que le véhicule soit Matching Numbers était un élément extrêmement important dans la décision d’achat.

Évidemment l’utilisation des termes « Matching Numbers » dans l’annonce ou son descriptif de vente permettra de souligner la non-conformité du véhicule à part rapport à la présentation contractuelle.

Les tribunaux en cas de litige pourront prendre en compte cet aspect parfois incontournable lors d’une cession de véhicule notamment en présence d’une automobile rare ou au pédigrée notable.

On pourra par exemple citer une décision rendue par le Tribunal de Grande Instance de Grasse à propos d’une Porsche 911S 2.4L de 1973 présentée comme « Matching Numbers » à la vente

Tribunal de grande instance de Grasse, Service des référés, 13 avril 2016, n° 16/00360

« Sur la demande d’expertise :

S’il existe un motif légitime de conserver et d’établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, des mesures d’instruction légalement admissible peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, notamment en référé;

Il convient de rappeler que l’application de ce texte n’implique aucun préjugé sur la recevabilité et le bien fondé des demandes formées ultérieurement ou sur la responsabilité des personnes appelées comme partie à la procédure ni sur les chances du procès susceptible d’être engagé ;

En l’espèce il suffit donc de constater qu’en l’espèce un tel procès est possible, qu’il a un objet et un fondement suffisamment déterminés, qu’il est justifié d’un motif légitime caractérisé par le fait que M. Z Y a acquis un véhicule décrit comme étant « matching number », cette spécificité ayant été pour lui essentielle, alors qu’il résulte du rapport d’expertise amiable réalisée ultérieurement par Monsieur X le 20 novembre 2015, que le véhicule Porsche ne présenterait pas les caractéristiques décrites.

Que la demande d’expertise est donc fondée sur un motif légitime ; »

En cas de litige relatif à un véhicule présenté à tort (ou à raison) comme « Matching Numbers », les avocats du cabinet pourront vous conseiller et vous accompagner dans une éventuelle procédure judiciaire ou rechercher une solution amiable.

Dans tous les cas, si vous un doute sur un véhicule vous ayant été présenté comme « Matching Numbers » n’hésitez pas à vous rapprocher sans délai du cabinet. Nous pourrons vous orienter vers des experts en automobile qui pourront confirmer ou infirmer la concordance des numéros. A l’issue de cette expertise, vous pourrez ou profiter de votre auto l’esprit tranquille ou engager une procédure dans les délais…

2022 le Dall Avocat Permis de conduire – Droit automobile

Nous contacter : ledall@maitreledall.com

portable de permanence : 06 64 88 94 14

Crédit photo : pixabay

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