Le décret n° 2024-528 du 10 juin 2024 portant diverses dispositions en matière de sécurité et de circulation routières vient encore d’allonger la liste des infractions pouvant être constatées sans interception et entraînant pour le titulaire du certificat d’immatriculation l’application du mécanisme de responsabilité pécuniaire prévue aux dispositions de l’article L.121-3 du Code de la route. Le point avec Maître Jean-Baptiste le Dall, Avocat à la Cour, Docteur en droit.
Un contrôle automatisé au spectre de plus en plus large
Cantonnés à la constatation de quelques infractions, les radars automatiques ont connu ces dernières années un élargissement du champ de compétence. Au départ les infractions pouvant être relevées grâce aux radars automatisés étaient spécifiées par le législateur. Le recours aux radars automatiques pour constater un nouveau type d’infraction devait donc faire l’objet d’une nouvelle loi.
Un simple décret pour étendre la liste des infractions constatables par radars automatiques
La loi n°2016–1547 du 18 novembre 2016, dite de modernisation de la justice du XXIe siècle, est venue confier au pouvoir réglementaire le soin de fixer la liste des infractions du ressort du contrôle automatique.
Les dispositions de l’article L. 130-9 du Code de la route font désormais un simple renvoi à une liste d’infractions fixées par décret en Conseil d’État.
« Lorsqu’elles sont effectuées par ou à partir des appareils de contrôle automatique ayant fait l’objet d’une homologation, les constatations relatives aux infractions dont la liste est fixée par décret en Conseil d’Etat font foi jusqu’à preuve du contraire. Ces constatations peuvent faire l’objet d’un procès-verbal revêtu d’une signature manuelle numérisée… »
Article L130-9 du Code de la route
Sans surprise, le gouvernement a très rapidement saisi cette opportunité par le biais d’un décret n° 2016-1955 du 28 décembre 2016 portant application des dispositions des articles L. 121-3 et L. 130-9 du code de la route.
Mais la constatation d’infractions au Code de la route par radar automatique sans interception laisse la possibilité d’échapper à la perte de point en contestant tout simplement avoir été au volant ou au guidon au moment des faits.
Redevable mais pas coupable !
La constatation d’une infraction au Code de la route par radar automatique ne permettra pas dans la plupart des cas l’identification de l’auteur des faits. C’est une simple plaque d’immatriculation qui est prise en photo. La constatation de l’infraction en éloignement (flash arrière) ne fera apparaître sur le cliché photographie que l’arrière d’un véhicule dans la moindre possibilité d’identification d’un conducteur. Les radars constatant les infractions par l’avant ne permettront que rarement cette identification. L’appareil de contrôle est positionné pour photographier une plaque d’immatriculation et pas forcément l’habitacle.
La constatation d’une infraction par le biais d’un radar automatique donne lieu à l’envoi d’un avis de contravention à destination du titulaire du certificat d’immatriculation. S’il ne souvient pas avoir été au volant au moment des faits, ce dernier pourra contester être l’auteur de l’infraction. Il reviendra à l’Officier du Ministère Public de rapporter la preuve de la culpabilité du destinataire de l’avis de contravention… Pas facile sans photographie exploitable…
Sans preuve d’une culpabilité, pas de condamnation pénale mais le titulaire du certificat d’immatriculation encourt toujours une responsabilité civile. C’est ce que prévoient les dispositions de l’article L.121-3 du Code de la route.
Par dérogation aux dispositions de l’article L. 121-1, le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule est redevable pécuniairement de l’amende encourue pour des infractions dont la liste est fixée par décret en Conseil d’Etat, à moins qu’il n’établisse l’existence d’un vol ou de tout autre événement de force majeure ou qu’il n’apporte tous éléments permettant d’établir qu’il n’est pas l’auteur véritable de l’infraction.
La personne déclarée redevable en application des dispositions du présent article n’est pas responsable pénalement de l’infraction. Lorsque le tribunal, y compris par ordonnance pénale, fait application des dispositions du présent article, sa décision ne donne pas lieu à inscription au casier judiciaire, ne peut être prise en compte pour la récidive et n’entraîne pas retrait des points affectés au permis de conduire. Les règles sur la contrainte judiciaire ne sont pas applicables au paiement de l’amende.
Lorsque le certificat d’immatriculation du véhicule est établi au nom d’une personne morale, la responsabilité pécuniaire prévue au premier alinéa incombe, sous les réserves prévues au premier alinéa de l’article L. 121-2, au représentant légal de cette personne morale.
Lorsque le véhicule était loué à un tiers, la responsabilité pécuniaire prévue au premier alinéa incombe au locataire, sous les réserves prévues au premier alinéa de l’article L. 121-2.
Dans le cas où le véhicule a été cédé, la responsabilité pécuniaire prévue au premier alinéa du présent article incombe, sous les réserves prévues au premier alinéa de l’article L. 121-2, à l’acquéreur du véhicule.
Article L 121-3 du Code de la route
La listes des infractions au Code de la route entraînant la responsabilité pécuniaire prévue à l’article L 121-3
C’est désormais l’article R 121-6 du Code de la route qui fixe la liste des infractions en présence desquelles la responsabilité pécuniaire du titulaire du certificat d’immatriculation pourra être retenue.
Le décret du 10 juin 2024 vient encore l’allonger la liste des infractions visées à l’article R 121-6.
Sans doute pris dans la précipitation avant que peut-être les prochaines élections ne permettent plus la signature d’un tel texte, le décret n° 2024-528 du 10 juin 2024 portant diverses dispositions en matière de sécurité et de circulation routières vient apporter de multiples modifications au Code de la route de la création d’une nouvelle infraction de position ou manœuvre acrobatique par conducteur d’un véhicule à moteur à l’obligation de communiquer à l’administration le rapport d’expertise automobile (procédure VE) sous un délai de 6 mois après son établissement en passant par la modification de la liste de l’article R 121-6 du Code de la route.
La notice du décret du 10 juin 2024 précise que le texte « poursuit un objectif de simplification de la constatation des infractions en élargissant la liste de celles pouvant être constatées sans interception ». En réalité, c’est bien un objectif financier qui est poursuivi…
Ont donc été ajoutées à la liste de l’article R121-6 du Code de la route : la circulation sur une portion du réseau routier prévue à l’article R. 411-17, le franchissement des passages à niveau et le passage des ponts prévu à l’article R. 422-4.
Les nouvelles dispositions de l’article R. 121-6 du Code de la route
Depuis le décret du 10 juin 2024, l’article R121-6 est ainsi rédigé :
Le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule est, en application de l’article L. 121-3, redevable pécuniairement de l’amende encourue pour des infractions aux règles sur :
1° Le port d’une ceinture de sécurité homologuée dès lors que le siège qu’il occupe en est équipé prévu à l’article R. 412-1 ;
2° L’usage du téléphone tenu en main ou le port à l’oreille de tout dispositif susceptible d’émettre du son prévus à l’article R. 412-6-1 ;
3° L’usage de voies et chaussées réservées à certaines catégories de véhicules, de voies vertes et d’aires piétonnes prévu au II de l’article R. 412-7 ;
3° bis La circulation sur une portion du réseau routier prévue à l’article R. 411-17 ;
4° L’arrêt, le stationnement ou la circulation sur les bandes d’arrêt d’urgence prévus à l’article R. 412-au 9° du II de l’article R. 417-10 et à l’article R. 421-7 ;
5° Le respect des distances de sécurité entre les véhicules prévu à l’article R. 412-12 ;
6° Le franchissement et le chevauchement des lignes continues prévus aux articles R. 412-19 et R. 412-22 ;
6° bis Le sens de la circulation ou les manœuvres interdites prévus aux articles R. 412-28 et R. 421-6 ;
7° Les signalisations imposant l’arrêt des véhicules prévues aux articles R. 412-30, R. 412-31 et R. 415-6 ;
8° Les vitesses maximales autorisées prévues aux articles R. 413-14, R. 413-14-1 et R. 413-17 ;
9° Le dépassement prévu aux articles R. 414-4, R. 414-6, R. 414-7 et R. 414-16 ;
10° L’engagement dans une intersection ou dans l’espace compris entre les deux lignes d’arrêt prévu à l’article R. 415-2 ;
10° bis La priorité de passage à l’égard du piéton prévue à l’article R. 415-11 ;
10° ter Le franchissement des passages à niveau prévu aux I, II et III de l’article R. 422-3 ;
10° quater Le passage des ponts prévu à l’article R. 422-4 ;
11° L’obligation du port d’un casque homologué d’une motocyclette, d’un tricycle à moteur, d’un quadricycle à moteur ou d’un cyclomoteur prévue à l’article R. 431-1 ;
12° L’obligation, pour faire circuler un véhicule terrestre à moteur, d’être couvert par une assurance garantissant la responsabilité civile, prévue aux articles L. 211-1 et L. 211-2 du code des assurances et à l’article L. 324-2 ;
13° Le port de plaques d’immatriculation dans les conditions prévues à l’article R. 317-8 ;
14° Le niveau d’émissions sonores prévue au deuxième alinéa de l’article R. 318-3 ;
15° Les limites de poids des véhicules ou ensembles de véhicules prévues aux articles R. 312-2 et R. 312-3, au VII de l’article R. 312-4 et aux articles R. 312-5 et R. 312-6 ;
16° La circulation d’un véhicule en marche normale sur la partie gauche d’une chaussée à double sens de circulation prévue au septième alinéa de l’article R. 412-9.
Article R 121-6 du Code de la route
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