CEA & Analyses de sang
A propos des vérifications d'alcoolémie
Les vérifications biologiques en matière d’alcoolémie sont strictement définies par le Code de la Santé Publique.
Seules des vérifications conformes à la procédure définies par les dispositions prévues aux articles R. 3354-1 et suivants du Code de la Santé Publique peuvent permettre d’établir le taux d’alcool présent dans la sang sur lequel des poursuites peuvent être engagées.
Toutes les étapes de cette procédure y sont décrites, la violation de l’une de ces dispositions peut donc être soulevée devant un tribunal. L’argumentation faisant état de cette ou ces violations devra être débattue in limine litis c’est à dire avant toute défense au fond. En pratique, l’avocat déposera des conclusions de nullité et les transmettra au tribunal avant que les faits et circonstances de l’affaire soient débattues. Mais attention en présence d’analyse de sang, d’éventuels problèmes de procédure ceci ne pourront être invoqués par l’avocat que si la contre analyse a été sollicité.
> Les dispositions du Code de la santé publique encadrant les opérations de prélèvement et de contrôle
> La mise en avant d’une carence liée à la procédure de prélèvement ou de contrôle
> La nécessité de solliciter la contre analyse
> L’interaction avec une prescription médicamenteuse
> La difficile requalification des faits en conduite en état d’ivresse manifeste
L'analyse de sang : pas de choix possible pour le conducteur souhaitant éluder l'éthylomètre
Le choix de l’éthylomètre ou de l’analyse de sang est laissé à la libre appréciation des Forces de l’ordre. Le conducteur, lui, n’a pas le choix. La jurisprudence est constante sur ce point. On pourra, à titre d’exemple, se référer à un arrêt rendu par la Cour de cassation en mai 1999 : « attendu qu’en prononçant ainsi, et dès lors que l’article L.1er du Code de la route ne prévoit pas, pour les auteurs des infractions visées par cet article, le droit de choisir entre deux modes de vérifications auxquels la loi accorde la même valeur probante, la cour d’appel a justifié sa décision sans encourir le grief du moyen qui doit en conséquence être écarté » (Cass. Crim., 18 mai 1999, n°98-85456).
Le conducteur qui refuserait l’épreuve de l’éthylomètre pourra, dès lors, être poursuivi pour refus de se soumettre aux vérifications médicales.
La mise en avant d'une carence liée à la procédure de prélèvement ou de contrôle
La violation de l’une des dispositions du Code de la santé publique pourra être soulevée devant le juge. C’est, par exemple, ce qui avait été fait dans une affaire portée à la connaissance de la Cour de cassation le 6 décembre 2000 : « attendu que, pour écarter la circonstance de conduite sous l’empire d’un état alcoolique retenue par le tribunal correctionnel comme cause d’aggravation des homicides involontaires reprochés au prévenu, l’arrêt attaqué relève que les résultats des vérifications biologiques d’alcoolémie ne peuvent être admis, dès lors que, si la première analyse, ayant révélé un taux de 3,20 g, a été effectuée par le laboratoire d’un établissement appartenant au service public hospitalier, comme le prévoit l’article R. 24-1, 1 , du Code des débits de boissons, les prescriptions du 2 dudit article et celles de l’article R. 26, dernier alinéa, du même Code n’ont pas été observées, l’analyse de contrôle, qui a conclu à un taux de 3,52 g, n’ayant pas été confiée à un biologiste expert inscrit sur la liste de la cour d’appel » (Cass. Crim., 6 décembre 2000, n° de pourvoi: 00-80687).
Pour ce faire, la violation de l’une de ces dispositions doit être soulevée in limine litis, c’est-à-dire avant tout débat au fond. En pratique, l’avocat rédigera des conclusions qui seront déposées devant le tribunal.
Si tel n’est pas le cas, l’argumentation ne sera pas examinée par la juridiction (voir, par exemple, Cass. Crim., 12 mars 2002, n° de pourvoi: 01-83328 : « attendu qu’il ne résulte ni du jugement, ni des conclusions déposées, que le demandeur, qui a comparu devant le tribunal correctionnel, ait soulevé devant cette juridiction, avant toute défense au fond, l’exception de nullité de l’expertise »).
La nécessité de solliciter la contre analyse
Comme pour les mesures opérées par le biais d’un éthylomètre, une contre analyse doit être proposée au conducteur. En présence d’un éthylomètre, il sera possible de souffler à deux reprises dans l’appareil, si le conducteur fait l’objet d’une analyse de sang il devra lui être proposé une contre analyse.
Si le conducteur émet ce souhait, une deuxième analyse sera opérée sur le deuxième flacon (c’est pour cette raison que le prélèvement sanguin est réparti en deux flacons…). Le conducteur peut solliciter cette contre analyse dans un délai de 5 jours à compter de la notification des résultats au cours de laquelle elle lui a été proposée.
Le choix qui sera fait par le conducteur peut s’avérer lourd de conséquences. Celui-ci ne s’en doute pas, mais le fait de refuser la contre analyse le privera, en théorie, de la possibilité de contester la régularité de l’analyse. En d’autres termes, il ne sera plus possible de faire état d’une violation des dispositions du Code de la santé publique si la contre-expertise a été refusée.
C’est ce qui a été rappelé à de nombreuses reprises par la jurisprudence comme en témoignent les décisions suivantes :
Cass. Crim., 5 avril 2011, n° de pourvoi: 10-85575
« Attendu que, pour écarter cette exception et confirmer le jugement qui a déclaré le prévenu coupable, l’arrêt relève que le prélèvement sanguin de M. X… a été effectué dans des conditions régulières, par un médecin requis à cet effet et ayant préalablement prêté serment, sans que la circonstance qu’il ait été pratiqué après son transfert dans un centre hospitalier soit de nature à modifier les résultats des analyses ; que les juges ajoutent que ces résultats ont été régulièrement notifiés, le 1er décembre 2008, à l’intéressé qui n’a pas demandé d’analyse de contrôle dans le délai de cinq jours ; qu’ils en déduisent que le prévenu n’est plus admis à contester la régularité des opérations biologiques ainsi effectuées ; »
Cass. Crim., 12 novembre 2008, n° de pourvoi: 08-84006
« Attendu que, pour écarter l’exception de nullité prise de l’irrégularité des opérations de contrôle de l’alcoolémie du prévenu, les juges énoncent que ce dernier a expressément renoncé à l’analyse de contrôle prévue par l’article R. 3354-14 du code de la santé publique ; qu’ils en déduisent à bon droit qu’il n’est pas admis, devant les juges du fond, à contester la régularité des vérifications biologiques auxquelles il a été soumis »
Attention cette règle s’applique même en cas de notification tardive des taux et même dans le cas où une première notification avait fait mention de résultats négatifs (voir, sur ce point, Cass. Crim., 12 février 2003, n° de pourvoi: 02-81994).
L'interaction avec une prescription médicamenteuse
La question de la perturbation des résultats du fait d’une prise médicamenteuse ou de l’administration de produits dans le cadre de soins opérés avant la prise de sang revient souvent de la part des conducteurs. La jurisprudence se montre, en pratique, très peu réceptive à ce type d’argumentation, exigeant avant tout que soit rapportée la preuve d’une influence sur les résultats.
Voir, sur ce point, Cass. Crim., 12 juin 2013, n° de pourvoi: 12-85920 :
« s’il est établi en l’espèce que le prévenu s’est vu administrer divers médicaments et, notamment, de la morphine, avant qu’il ne soit soumis à une prise de sang destinée à déterminer son taux d’alcoolémie, celui-ci ne rapporte nullement la preuve, qui lui incombe, de l’influence du médicament qu’il allègue, en défense, sur ce taux d’alcoolémie.»
Outre l’influence avérée ou pas du produit ingéré sur les résultats de l’analyse de sang, se posera également la question du comportement du conducteur qui aurait pu (ou dû) connaître les effets du ou des médicaments. C’est ce qu’il ressort, par exemple, d’un arrêt de 2003 (Cass. Crim., 10 décembre 2003, n° de pourvoi: 03-84096) :
La difficile requalification des faits en conduite en état d'ivresse manifeste
Le choix du recours à l’éthylomètre ou à l’analyse de sang appartient pleinement aux agents des forces de l’ordre qui en pratique ne retiennent la voie de l’analyse sanguine que lorsque le conducteur n’est, objectivement, pas dans la capacité de souffler. Généralement, l’état de ce conducteur ne lui permettra pas non plus de montrer les signes d’une ivresse manifeste… Les risques de requalification de conduire sous l’empire d’un état alcoolique en conduite en état d’ivresse manifeste sont donc plus faible en présence d’une procédure reposant sur une analyse sanguine.
Voir, sur ce point, Cass. Crim., 12 juin 2013, n° de pourvoi: 12-85920 :
« s’il est établi en l’espèce que le prévenu s’est vu administrer divers médicaments et, notamment, de la morphine, avant qu’il ne soit soumis à une prise de sang destinée à déterminer son taux d’alcoolémie, celui-ci ne rapporte nullement la preuve, qui lui incombe, de l’influence du médicament qu’il allègue, en défense, sur ce taux d’alcoolémie.»
Outre l’influence avérée ou pas du produit ingéré sur les résultats de l’analyse de sang, se posera également la question du comportement du conducteur qui aurait pu (ou dû) connaître les effets du ou des médicaments. C’est ce qu’il ressort, par exemple, d’un arrêt de 2003 (Cass. Crim., 10 décembre 2003, n° de pourvoi: 03-84096) :