L’avis de rétention de permis de conduire, c’est souvent le document qui est remis au conducteur en échange de son permis de conduire après la commission d’une infraction grave au Code de la route. La plupart du temps la remise de ce document n’est que la première étape avant une privation plus longue du permis de conduire. Les conseils d’urgence et les explications de Jean-Baptiste le Dall, Avocat à la cour, Docteur en droit, Directeur scientifique des États généraux du droit automobile.
Rétention du permis de conduire : pour quelles infractions ?
Toutes les infractions au Code de la route ne vont pas entraîner la perte immédiate du permis de conduire. Seules les infractions les plus graves se traduiront par la privation du carton rose directement sur le bord de la route.
Un faible excès de vitesse ou un oubli du port de ceinture de sécurité, ne pourront pas entraîner la privation du permis de conduire à l’issue de la constatation de l’infraction.
Entraîneront, par contre, la rétention du permis de conduire la commission de délit comme le délit de conduite sous l’empire d’un état alcoolique, le délit de conduite après usage de stupéfiants, le refus d’obtempérer…
Si dans la pratique, la commission d’un délit se traduit par une rétention du permis de conduire, telle ne sera pas la règle en matière de contraventions pour lesquelles la privation du permis de conduire est plus rare. La remise d’un avis de rétention demeure l’exception et concernera les grands excès de vitesse (contravention de cinquième classe pour les dépassements de 50 km/h au-delà de la vitesse autorisée) et les excès de vitesse compris entre 40 et 49 kilomètres au-delà de la vitesse autorisée. Le code de la route prévoit également désormais la possibilité de Privé, le conducteur de son permis de conduire après la constatation d’une infraction d’usage du téléphone portable au volant (ou au guidon) lorsque cette infraction a été commise simultanément avec une autre infraction au Code de la route (pour la liste de ces infractions, voir le Décret n° 2020-605 du 18 mai 2020 portant diverses dispositions en matière de sécurité routière et les dispositions de l’article R. 224-19-1 du Code de la route) .
C’est ce que prévoient les dispositions de l’article Article L224-1 du Code de la route
I.-Les officiers et agents de police judiciaire retiennent à titre conservatoire le permis de conduire du conducteur :
1° Lorsque les épreuves de dépistage de l’imprégnation alcoolique et le comportement du conducteur permettent de présumer que celui-ci conduisait sous l’empire de l’état alcoolique défini à l’article L. 234-1 ou lorsque les mesures faites au moyen de l’appareil homologué mentionné à l’article L. 234-4 ont établi cet état ;
2° En cas de conduite en état d’ivresse manifeste ou lorsque le conducteur refuse de se soumettre aux épreuves et mesures prévues au 1° du présent I. Le procès-verbal fait état des raisons pour lesquelles il n’a pu être procédé aux épreuves de dépistage prévues au même 1°. En cas de conduite en état d’ivresse manifeste, les épreuves doivent être effectuées dans les plus brefs délais ;
3° Lorsqu’il est fait application des dispositions de l’article L. 235-2, si les épreuves de dépistage se révèlent positives ;
4° S’il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner que le conducteur a fait usage de stupéfiants ou lorsqu’il refuse de se soumettre aux épreuves de vérification prévues au même article L. 235-2 ;
5° Lorsque le véhicule est intercepté, lorsque le dépassement de 40 km/ h ou plus de la vitesse maximale autorisée est établi au moyen d’un appareil homologué ;
6° En cas d’accident de la circulation ayant entraîné la mort d’une personne ou ayant occasionné un dommage corporel, lorsqu’il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner que le conducteur a commis une infraction en matière d’usage du téléphone tenu en main, de respect des vitesses maximales autorisées ou des règles de croisement, de dépassement, d’intersection et de priorités de passage ;
7° Lorsque le véhicule est intercepté, lorsqu’une infraction en matière d’usage du téléphone tenu en main est établie simultanément avec une des infractions en matière de respect des règles de conduite des véhicules, de vitesse, de croisement, de dépassement, d’intersection et de priorités de passage dont la liste est fixée par décret en Conseil d’Etat ;
8° En cas de refus d’obtempérer commis dans les conditions prévues aux articles L. 233-1 et L. 233-1-1.
II.-Les dispositions du I du présent article, hors les cas prévus aux 5°, 6°, 7° et 8° du même I, sont applicables à l’accompagnateur de l’élève conducteur.
III.-Les agents de police judiciaire adjoints mentionnés à l’article 21 du code de procédure pénale sont habilités à retenir à titre conservatoire le permis de conduire du conducteur dans les cas prévus aux 5° et 7° du I du présent article.
Article L224-1 du Code de la route
Avis de rétention contre permis de conduire
À la suite des infractions précédemment envisagées, les agents vont procéder à la confiscation du permis de conduire directement sur le bord de la route (ou commissariat) et remettre en échange à l’intéressé un avis de rétention du permis de conduire.
Ce document entraîne pour le conducteur, l’interdiction de reprendre le volant ou le guidon pendant une durée de 72 heures ou 120 heures. C’était également pendant ce délai que le préfet pour prendre un arrêté de suspension de permis de conduire référencé 3F.
Avis de rétention : une durée qui varie de 72 à 120 heures
Pendant longtemps, pas de questions à se poser sur la durée de la rétention qui ne différaient pas selon les délits ou les contraventions. Pour tous les conducteurs concernés par cette rétention du permis de conduire la durée unique était de 72 heures.
Il a été prévue une durée rallongée à 120 heures, soit cinq jours pour les délits d’alcool au volant : conduite sous l’empire d’un état alcoolique et conduite en état d’ivresse manifeste, les délits de conduite après usage de stupéfiants, les refus de se soumettre à vérifications destinées à établir un alcoolique ou une présent ce produits stupéfiants dans l’organisme ou encore le délit de refus d’obtempérer.
72 heures ou 120 heures : un délai de prise de décision et non pas de notification
L’espérance de vie d’un avis de rétention est donc extrêmement limitée, mais que se passe-t-il en pratique pour le conducteur en l’absence de nouvelle au bout de 72 ou 120 heures ?
Le délai de 72 ou de 120 heures est un délai de prise de décision. En d’autres termes, le préfet peut parfaitement prendre sa décision à la dernière minute de la dernière heure qui lui est accordée pour la signature de l’arrêté. Si la décision préfectorale de suspension de permis de conduire est prise en toute dernière minute, on imaginera qu’entre la mise sous pli en préfecture et l’acheminement par voie postale, le conducteur ne sera pas notifié avant quatre ou cinq jours…
Le Code de la route ne prévoit pas de délai de notification, l’intéressé peut donc recevoir son arrêté 3F (ou 1F) plusieurs dizaines de jours après la commission des faits lui étant reprochés. Cette notification tardive ne remettra pas, en elle-même, en cause la régularité de la décision de suspension provisoire (la notification de la suspension de permis de conduire sera la plupart du temps opérée par le biais d’un courrier recommandé, le document pourra également être remis directement par des agents, gendarmes ou policiers à l’intéressé ou même dans de très rares cas être affichés en mairie) .
72 ou 120 heures : espérance de vie limitée pour la vie de rétention du permis de conduire.
Ce document administratif, n’a qu’une courte espérance de vie de quelques jours aux termes desquels le conducteur reste régulièrement sans nouvelle. Même si ce document cesse de produire ses effets au bout de 72 ou 120 heures, il pose néanmoins le cadre d’un contexte particulier avec un conducteur privé de son permis de conduire.
L’avis de rétention informe intéressé, de la suite probable des événements avec un fort risque de survenance d’une mesure de suspension administrative. Le conducteur est notamment informé, dès qu’on dit des dispositions du code de la route, lui permettant de solliciter la restitution de son permis de conduire à l’issue du délai de 72 ou 120 heures.
L’avis de rétention, un document administratif souvent mal rempli
Il est très fréquent que le conducteur sous le coup d’un avis de rétention du permis de conduire, pointe le doigt sur un certain nombre d’erreurs, de approximations ou d’oublis dans la rédaction de ce document. De telles erreurs ne permettent pas forcément de prédire une récupération rapide du permis de conduire pour l’intéressé.
On rappellera tout d’abord que l’avis de rétention a une espérance de vie extrêmement courte de 72 ou 120 heures, ce qui techniquement ne laisse pas réellement de temps pour envisager d’engager un recours à son encontre.
Le document qui sera ultérieurement, notifié à l’intéressé, et portant suspension provisoire de son permis de conduire, ne comportera pas forcément les mêmes erreurs…
On rappellera également que l’avis de rétention du permis de conduire, n’est qu’un document administratif, et n’a pas la valeur d’un procès-verbal. En d’autres termes si certains procès-verbaux présents au dossier pénal lors de l’examen de l’affaire devant le tribunal de police ou le tribunal correctionnel révèlent des indications non-erronées, il ne sera pas possible d’exploiter les approximation, les oublis, ou les mauvaises informations décelés sur l’avis de rétention.
Pour autant, si elles ne suffisent pas à prédire une relaxe pour le conducteur, de telles erreurs ou approximations devront être signalées à votre avocat qui pourrait éventuellement concevoir une stratégie pour les exploiter. On insistera également sur le fait que parfois sont commises de véritables erreurs dans la constatation d’une infraction. On pense, par exemple, à des points de contrôle kilométriques ou des problèmes de mauvaises limitations de vitesse, autant de points de discussion qu’il sera pertinent de faire valoir rapidement auprès du préfet ou devant une juridiction administrative…
De manière générale, le conducteur qui souhaite se défendre, aura tout intérêt à confier la gestion de son dossier à son avocat, sans attendre la réception de nouveaux documents ou de convocations en justice ou en audition auprès des gendarmes… L’avocat pourra conseiller au mieux son client pour d’éventuels rendez-vous avec les forces de l’ordre et surtout mettre en place la stratégie la plus adaptée aux contraintes de son client.
Délit de conduite malgré rétention du permis de conduire
Attention, on ne reprend pas le volant ou le guidon, alors que l’on est sous le coup d’un avis de rétention.
En cas de contrôle, ce sont des poursuites pour conduite malgré rétention du permis de conduire qui seraient engagées, avec à la clé pour ce délit des sanctions lourdes, une mention au bulletin numéro 2 du casier judiciaire, et on l’oublie souvent une décision de retrait de six points du permis de conduire. Entre le retrait de points lié à la conduite malgré la rétention et celui lié à l’infraction ayant généré la rétention, le conducteur pourrait se retrouver mathématiquement dans une solution délicate au regard de son nombre de points de permis de conduire.
Pour mémoire les dispositions de l’article du Code de la route, prévoient en cas de condamnation pour conduite malgré rétention :
I.-Le fait pour toute personne, malgré la notification qui lui aura été faite d’une décision prononçant à son encontre (…) la rétention (…) est puni de deux ans d’emprisonnement et de 4 500 euros d’amende.
II.-Toute personne coupable du délit prévu au présent article encourt également les peines complémentaires suivantes :
1° La confiscation obligatoire du véhicule dont le condamné s’est servi pour commettre l’infraction, s’il en est le propriétaire. La juridiction peut toutefois ne pas prononcer cette peine, par une décision spécialement motivée. La confiscation n’est pas obligatoire lorsque le délit a été commis à la suite d’une des mesures administratives prévues aux articles L. 224-1, L. 224-2 et L. 224-7.
2° La suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire, cette suspension ne pouvant pas être limitée à la conduite en dehors de l’activité professionnelle ;
3° La peine de travail d’intérêt général selon des modalités prévues à l’article 131-8 du code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code et à l’article L. 122-1 du code de la justice pénale des mineurs ;
4° La peine de jours-amende dans les conditions fixées aux articles 131-5 et 131-25 du code pénal ;
5° L’interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n’est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
6° L’obligation d’accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière.
III.-Toute personne coupable du délit prévu au présent article, dans les cas où il a été commis à la suite d’une décision de suspension ou de rétention du permis de conduire, encourt également la peine complémentaire d’annulation de ce permis, avec interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis pendant trois ans au plus.
IV.-L’immobilisation peut être prescrite dans les conditions prévues aux articles L. 325-1 à L. 325-3.
V.-Le délit prévu au présent article, dans le cas où il a été commis à la suite d’une décision de suspension ou de rétention du permis de conduire, donne lieu de plein droit à la réduction de la moitié du nombre maximal de points du permis de conduire.
Article L224-16 du Code de la route
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