Permis probatoire : un permis tout neuf que l’on peut perdre plus vite que l’on ne l’a décroché !
Le permis de conduire : un sésame difficile parfois à décrocher, mais que l’on peut vite perdre. Jean-Baptiste le Dall, Avocat à la Cour, Docteur en Droit revient sur les spécificités de ce permis de conduire réservé (mais pas que) aux plus jeunes conducteurs.
Permis de conduire probatoire : un nombre de points limité
Le jeune conducteur qui va décrocher le précieux sésame se verra dans un premier temps attribuer un capital de points limité à six. Le conducteur en permis probatoire pourra potentiellement chaque année augmenter son nombre de points avec une bonification en l’absence de décision de retrait de points de permis de conduire.
Le jeune conducteur qui aura décroché le précieux sésame à la suite d’un apprentissage en conduite accompagnée verra sa période de probation réduite à deux ans. Ce jeune conducteur pourra donc voir son capital de points grimper à 9 à l’issue de la première année pour atteindre les 12 à la fin de la deuxième année.
Le conducteur qui aura suivi un apprentissage plus classique en auto-école demeurera en régime probatoire pendant une durée de trois ans. Pour lui, la bonification prendra la forme suivante : 6 points, 8 points, 10 points, pour enfin arriver aux 12 points à la fin de la troisième année de permis.
Plus de points bonus après un retrait de point(s) de permis de conduire
Le mécanisme de majoration annuelle de points de permis de conduire pour les permis probatoires se figera dès la survenance d’une décision de retrait de point(s) de permis de conduire.
Si, par exemple, un jeune conducteur perd 4 points la première année de son permis de conduire, il ne gagnera pas les 2 points bonus à l’issue de son premier anniversaire de permis de conduire. Il ne gagnera pas non plus les 2 points de bonus à l’issue de son deuxième anniversaire de permis de conduire et il ne gagnera pas davantage les 2 points bonus à l’issue de son troisième anniversaire de permis de conduire.
Autre exemple : un conducteur en permis probatoire fête sa première année de permis de conduire sans la moindre infraction. De 6 points il grimpe à 8 points. Par contre, il fait l’objet d’une décision de retrait de points la deuxième année, le mécanisme de majoration de points est alors bloqué. Il ne pourra pas prétendre à l’acquisition des 2 points bonus à l’issue de sa deuxième année de permis de conduire. Et de même, il ne pourra pas prétendre à l’acquisition des 2 points à l’issue de la troisième année de permis de conduire.
Pas de points bonus = pas de déplafonnement du capital de points
En l’absence d’acquisition des 2 points de bonus annuel, le conducteur ne verra pas son plafond de points augmenter.
Prenons l’exemple d’un jeune conducteur ayant fait l’objet d’une décision de retrait de trois points de son permis de conduire à la suite d’une verbalisation pour défaut de port de la ceinture de sécurité. De 6 points, il passe alors à 3 points. Cette décision de retrait de points le prive de la bonification annuelle de 2 points et surtout son plafond de points restera figé à 6 maximum jusqu’à sa sortie de probatoire.
Sortie de probatoire = déplafonnement du capital de points
Pour les conducteurs à l’encontre desquels une décision de retrait de points aurait été prononcée pendant la période de probation en sortiront sans bonus particulier à l’issue des trois ans. Ils pourront, par contre, en cas de besoin immédiatement suivre un stage de sensibilisation à la sécurité routière, et pourront en récolter, non pas tous les fruits, mais tous les points avec un capital de points désormais déplafonné.
Par exemple, le conducteur qui se serait vu verbaliser et retirer 2 points de son permis de conduire la deuxième année, sortira de sa période probatoire avec un capital de 6 points sur 8.
La veille de ses trois ans de permis, un stage ne lui aurait rapporté que 2 points jusqu’à son plafond de 8 points. Sorti de sa période probatoire, le conducteur n’est plus plafonné. En cas de suivi d’un stage de sensibilisation à la sécurité routière, son capital de points passera ainsi de 6 à 10 avec une majoration de 4 points.
Stage de récupération de points et permis probatoire
Le Conseil d’État avec deux arrêts du 29 septembre 2023 vient de faire évoluer la jurisprudence dans un sens très favorable aux jeunes conducteurs en permis de conduire probatoire.
Jusqu’à ses deux arrêts, lorsqu’un jeune conducteur était confronté au retrait de l’ensemble de ses points, à la suite d’une seule et unique décision de retrait de points, il ne lui était pas possible de prétendre à la majoration de 4 points liée à un stage de sensibilisation à la sécurité routière.
Une telle pratique est désormais possible, même si elle implique, pour l’intéressé, une grande attention à l’évolution de son solde de points de permis de conduire.
PV : contester pour sauver son permis de conduire !
Avec un maigre capital de 6 points la première année de permis de conduire, les risques d’invalidation de permis par défaut de point sont, bien sûr, plus élevés pour les jeunes conducteurs.
Un jeune conducteur ne disposant que de 6 points sur son permis de conduire et qui serait confronté à une future décision de retrait de 6 points pourra envisager de faire appel aux services d’un avocat pour contester la verbalisation ou repousser la survenance d’une condamnation définitive.
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Quand les points de permis de conduire sont-ils retirés ?
Par le biais de la contestation de l’avis de contravention, le conducteur pourra repousser la survenance du retrait de points et pourra prétendre à la bonification annuelle de 2 ou 3 points. C’est parfois l’ajout de ces points qui permettra de préserver un solde positif et par là-même la validité du permis de conduire.
Le conseil de l’avocat : 6 points sur un permis de conduire, l’expérience montre que ce solde peut se révéler insuffisant surtout pour un jeune conducteur. On ne se mentira pas : les jeunes conducteurs auront plus de risques de se faire verbaliser que les conducteurs les plus expérimentés. Reconnaissons-le, le jeune conducteur pourra se montrer plus audacieux au volant que ses ainés, il aura moins d’expérience, mais surtout il conduira souvent un véhicule plus ancien et mal entretenu que les forces de l’ordre ne manqueront pas de remarquer dans le flot de la circulation. Le jeune conducteur circulera également dans des lieux propices aux contrôles routiers. A l’évidence en sortie de discothèque à 3h du matin, les agents de police ou les gendarmes auront statistiquement plus de chances de contrôler un jeune conducteur qu’une mère de famille de 45 ans…
Fort de ce constat, on conseillera donc aux jeunes conducteurs d’adopter une conduite apaisée leur permettant d’obtenir la majoration de points liée à l’absence de retrait de point la première année. Avec 8 points et la possibilité de remonter son capital de points à 8 via un stage, le jeune conducteur éloigne le risque d’invalidation du permis par défaut de point. En cas de verbalisation durant la première année de permis, le jeune conducteur pourra se rapprocher de son avocat pour envisager une contestation de la verbalisation.
Stage obligatoire et permis de conduire probatoire
Le Code de la route prévoit l’obligation pour les jeunes conducteurs de suivre un stage de sensibilisation à la sécurité routière, dès lors qu’ils perdent la moitié des points affectés à leur permis de conduire probatoires.
« Le titulaire du permis de conduire qui a commis une infraction ayant donné lieu à retrait de points peut obtenir une récupération de points s’il suit un stage de sensibilisation à la sécurité routière qui peut être effectué dans la limite d’une fois par an. Lorsque le titulaire du permis de conduire a commis une infraction ayant donné lieu à un retrait de points égal ou supérieur au quart du nombre maximal de points et qu’il se trouve dans la période du délai probatoire défini à l’article L. 223-1, il doit se soumettre à cette formation spécifique qui se substitue à l’amende sanctionnant l’infraction. »
Article L223-6 du Code de la route
Cette obligation sera matérialisée pour l’intéressé par un courrier recommandé référencé 48N.
Par le biais de ce courrier, il est fait obligation aux conducteurs de suivre un stage de sensibilisation à la sécurité routière dans un délai de quatre mois.
Le suivi de ce stage pourra permettre à l’intéressé d’augmenter son capital de points. Toutefois, comme pour tous les autres conducteurs, un conducteur sous le coup du régime probatoire ne peut prétendre au bénéfice de l’augmentation de points par le biais d’un stage qu’une fois par an.
Il est néanmoins possible pour un jeune conducteur, de se voir contraint à suivre dans la même année deux stages de sensibilisation à la sécurité routière. Le premier lui permettra une augmentation de son capital de points de permis de conduire. Le second suivi dans la même année que le premier ne lui rapportera aucun point.
Dans cet exemple, les deux stages suivis la même année permettront, par contre, aux conducteurs de bénéficier du remboursement de l’amende relative à l’infraction ayant généré le retrait de point.
Courrier 48 N : risque de suspension de permis en cas de non suivi de stage
Le Code de la route prévoit pour les courriers référencés 48 N, le recours à la lettre recommandée afin de s’assurer de la régularité de la notification au conducteur. La régularité de la décision de retrait de points n’est pas conditionnée au recours au courrier recommandé et à la preuve du recours à celui-ci.
Le recours au recommandé est, par contre, prévu par le Code de la route à des fins pénales, puisque l’absence de suivi du stage obligatoire est réprimée et sanctionnées.
Le jeune conducteur qui ignorerait l’obligation qui lui est faite par ce courrier 48 N prend, ainsi, le risque d’être condamné par le Tribunal de police à une peine de suspension de permis de conduire !
I.-Lorsque le conducteur titulaire du permis de conduire a commis, pendant le délai probatoire défini à l’article L. 223-1, une infraction ayant donné lieu au retrait d’au moins trois points, la notification du retrait de points lui est adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Cette lettre l’informe de l’obligation de se soumettre à la formation spécifique mentionnée au quatrième alinéa de l’article L. 223-6 dans un délai de quatre mois.
II.-Le fait de ne pas se soumettre à la formation spécifique mentionnée au I dans le délai de quatre mois est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la 4e classe.
III.-Toute personne coupable de cette infraction encourt également la peine complémentaire de suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire, cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l’activité professionnelle.
Article R223-4 du Code de la route
Permis probatoire et infractions routières spécifiques
Le Code de la route réserve parfois un traitement différent aux jeunes conducteurs. Tel sera le cas en matière de vitesse avec des limitations abaissées pour les conducteurs les moins expérimentés.
I.-Tout élève conducteur et, pendant le délai probatoire défini à l’article L223-1, tout conducteur titulaire du permis de conduire est tenu de ne pas dépasser les vitesses maximales suivantes :
1° 110 km/ h sur les sections d’autoroutes où la limite normale est de 130 km/ h ;
2° 100 km/ h sur les sections d’autoroutes où cette limite est plus basse, ainsi que sur les routes à deux chaussées séparées par un terre-plein central ;
3° 80 km/ h sur les autres routes.
Article R413-5 du Code de la route
Le Code de la route prévoit également un seuil contraventionnel abaissé en matière de taux d’alcool autorisé.
« I. – Même en l’absence de tout signe d’ivresse manifeste, est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe le fait de conduire un véhicule sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par :
1° Une concentration d’alcool dans le sang égale ou supérieure à 0,20 gramme par litre ou par une concentration d’alcool dans l’air expiré égale ou supérieure à 0,10 milligramme par litre et inférieure aux seuils fixés à l’article L. 234-1, chez le conducteur d’un véhicule de transport en commun, chez le conducteur dont le droit de conduire est limité aux seuls véhicules équipés d’un dispositif homologué d’anti-démarrage par éthylotest électronique, installé par un professionnel agréé ou par construction, conformément aux dispositions de l’article L. 234-17, ainsi que chez le conducteur titulaire d’un permis de conduire soumis au délai probatoire défini à l’article L. 223-1 ou en situation d’apprentissage définie à l’article R. 211-3 ; »
Article R234-1 du Code de la route
Comme d’habitude, en matière d’alcoolémie au volant, deux mesures sont exprimées : en milligrammes par litre d’air expiré ou en grammes par litre de sang.
La première mesure sera celle indiqué par un éthylomètre et pour avoir son équivalent dans le sang, il suffira de multiplier par deux la mesure.
En pratique, avec un taux aussi bas, le jeune conducteur ne pourra même pas se permettre un fond de verre. Les pouvoirs publics ont souhaité ne pas retenir pour les jeunes conducteurs un taux zéro pour éviter les problématiques liées à une alcoolisation insignifiante involontaire causée par exemple par une consommation de pâtisseries aromatisées à l’alcool ou des chocolats légèrement alcoolisés… Mais lorsqu’il s’agit de prise de boisson, un taux aussi bas n’autorise pas la consommation du moindre verre
Permis probatoire : pas uniquement réservé aux jeunes conducteurs !
On rappellera que le permis probatoire ne concerne pas que les jeunes conducteurs. Après une mesure d’invalidation de permis de conduire pour défaut de point, ou une peine d’annulation, prononcée par un tribunal, le conducteur qui souhaiterait retrouver le volant ou le guidon et qui se présenterait à nouveau aux épreuves du permis de conduire récupérera un permis probatoire.
Selon sa situation, le conducteur privé de permis de conduire pourra, ou non, bénéficier de la dispense des épreuves pratiques du permis de conduire.
Le conducteur bénéficiant de cette dispense des épreuves pratiques échappera également aux limitations de vitesse spécifiques applicables aux jeunes conducteurs, ainsi qu’au taux d’alcool autorisé abaissé à 0.10 mg/ litre d’air expiré.
Pour le reste il sera soumis au mécanisme de majoration progressive du solde de points en l’absence de décision de retrait de point.
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