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Récidive

A propos de la récidive

La répétition d’infractions au Code de la route pourra placer le conducteur dans une situation délicate. Au delà de la perte progressive des points affectés au capital de son permis de conduire, le mécanisme de récidive légale pourra confronter le conducteur à des peines dites de plein droit ou obligatoire.

Appliqué à l’alcool au volant ou au délit de conduite après usage de stupéfiants l’état de récidive légale implique des peines d’annulation du permis de conduire et confiscation du véhicule.

La récidive : c'est quoi ?

A retenir : un délai de 5 ans pour les délits

La notion de récidive implique la réitération de faits de nature identique dans un certain délai. Pour faire simple, on pourra retenir qu’en matière délictuelle et donc pour les délits de conduite sous l’empire d’un état alcoolique, de conduite après usage de stupéfiants, de conduite en état d’ivresse manifeste ou de refus de se soumettre aux vérifications destinées à établir l’état alcoolique… le délai de récidive est de cinq ans.

5 ans à compter de la dernière condamnation définitive sauf exception

Ce délai démarre à compter de la condamnation définitive et non de la date des faits. Une décision de condamnation devient définitive lorsque toutes les voies de recours sont épuisées. Par contre la date prise en compte pour les deuxièmes faits correspond à la date de commission de l’infraction. Les conducteurs qui ne parviendraient plus à identifier la date de condamnation définitive pourront se référer au relevé d’information intégral qui fera mention de cette condamnation.

En matière de récidive d’alcool au volant, il sera rappelé que ne seront pris en compte que les délits. Ainsi des précédents faits d’alcool au volant qui auraient entraîné la remise d’un avis de contravention (amende de 90 euros pour le tarif minoré, ou 135 euros pour l’amende forfaitaire et retrait de 6 points) ne conduiront pas à ce que soit retenue la récidive légale en cas de poursuites délictuelles pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique moins de 5 ans après.

La computation du délai de 5 ans à compter de la date de la condamnation définitive permettra dans la plupart des cas d’identifier une problématique de récidive. Plus rarement, le conducteur pourra être confronté à la fixation du premier terme de la récidive à la date de prescription de la précédente peine (pour une application jurisprudentielle, voir par exemple : Crim. 14 oct. 2014, n°13-87.636 FS-P+B+I). En pratique le délai peut donc être bien supérieur à cinq ans. Cette question devra être vérifiée avec l’avocat lors de la préparation de l’audience. 

Le cas de la composition pénale

Stricto sensu la composition n’est pas une condamnation, le conducteur qui ainsi aurait « bénéficié » de cette procédure ne sera pas poursuivi pour alcool au volant en état de récidive légale s’il est à nouveau poursuivi pour ce type de faits moins de 5 ans après.

Des faits identiques

En matière d’alcool au volant, les délits de conduite sous l’empire d’un état alcoolique et de conduite en état d’ivresse manifeste sont assimilés. En d’autres termes, un conducteur qui a été condamné une première fois pour conduite sous l’empire d’un état alcoolique pourra être poursuivi pour conduite en état d’ivresse manifeste en état de récidive légale si ces seconds faits sont commis moins de 5 ans après la date de la première condamnation définitive.

La récidive : quelles conséquences ?

En matière d’alcool ou de stupéfiants au volant, l’état de récidive légale aura pour conséquences l’application de peines automatiques : l’annulation de plein droit du permis de conduire et la confiscation du véhicule. Pour autant, le conducteur confronté à plusieurs poursuites pour alcool au volant et qui ne tomberait pas sous le coup de la récidive devra être alerté sur le fait que les magistrats se montreront plus sévères du fait de cette réitération.

On pense, par exemple, au conducteur qui se serait fait contrôler plusieurs fois positif à l’alcool mais avant d’être condamné pour les premiers faits, ou à celui qui bénéficiant d’une composition pénale est convoqué devant le tribunal correctionnel quelques semaines seulement après l’exécution de mesure de composition pénale…

Certes, dans ces hypothèses, d’un strict point de vue juridique, la récidive légale ne sera pas retenue, mais les magistrats ne manqueront pas de prendre en compte la réitération des faits. Et on rappellera qu’en présence d’une simple réitération pour des faits d’alcool ou de stupéfiants,  l’annulation du permis de conduire n’est pas une peine de plein devant être obligatoirement constatée par les juges… mais rien ne leur interdit de la prononcer quand même…

L'annulation du permis de conduire : un peine de plein droit

L’article L. 234-13 du code de la route oblige le tribunal correctionnel, lorsqu’il condamne une personne en état de récidive pour le délit de conduite en état alcoolique (CEA) ou en état d’ivresse manifeste (CEI), à prononcer la peine complémentaire d’annulation du permis de conduire.

Les infractions visées aux articles L. 234-1 et L. 234-8 sont :

– le fait de conduire un véhicule sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par une concentration d’alcool dans le sang égale ou supérieure à 0,80 gramme par litre ou par une concentration d’alcool dans l’air expiré égale ou supérieure à 0,40 milligramme par litre et le fait de conduire en état d’ivresse manifeste ;

– le fait de refuser de se soumettre aux vérifications destinées à établir l’état alcoolique.

On retrouve également ce mécanisme en matière de conduite après usage de stupéfiants.

Avec ces dispositions du Code de la route le juge n’a plus le pouvoir d’éluder l’annulation et c’est d’ailleurs ce que ne manque pas de souligner le Conseil constitutionnel « afin de souligner la différence de régime et décourager les plaideurs de solliciter l’indulgence du tribunal, les juges ont pris l’habitude, dans le dispositif de leur décisions, de « prononcer » l’annulation du permis de conduire, en cas de primo délinquance, et de la « constater » en cas de récidive. Le juge qui, en présence, de poursuites pour alcool au volant en état de récidive légale ne prononcerait pas l’annulation verrait automatiquement sa décision censurée (Cass. crim. 29 septembre 2004, n° 04-82238).

Pour retrouver le droit de conduire, l’intéressé devra repasser son permis

Avant le passage des épreuves du permis de conduire, le conducteur condamné devra passer une visite médicale et subir les tests psychotechniques (Cf. article L. 224-14 du code de la route)

Le candidat pourra être dispensé du passage de l’épreuve pratique (la conduite) et ne passer que le code pour obtenir un nouveau titre de conduire. C’est ce que prévoit l’article R. 224-20 du code de la route : « pour les conducteurs titulaires du permis de conduire depuis trois ans ou plus à la date de la perte de validité du permis ou à la date de son annulation, et auxquels il est interdit de solliciter un nouveau permis pendant une durée inférieure à un an, l’épreuve pratique est supprimée sous réserve qu’ils sollicitent un nouveau permis moins de neuf mois après la date à laquelle ils sont autorisés à le faire. »

Une peine d'annulation de plein droit validée par le Conseil constitutionnel

La question de la conformité de cette peine prononcée automatiquement à la Constitution et au bloc de constitutionnalité a été posée au Conseil constitutionnel par le biais d’une QPC (question prioritaire de constitutionnalité). Pour de nombreux praticiens, l’automaticité de cette peine ne pouvait que difficilement cohabiter avec le principe d’individualisation des peines. Comment peut-on individualiser une peine alors qu’elle est automatique ?

La question n’a pas semblé émouvoir outre mesure le Conseil constitutionnel qui a validé cette annulation de plein droit dans une décision du 29 septembre 2010

Décision n° 2010-40 QPC du 29 septembre 2010

« Considérant qu’aux termes de l’article 8 de la Déclaration de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée » ; que le principe d’individualisation des peines qui découle de cet article implique que la peine d’annulation du permis de conduire ne puisse être appliquée que si le juge l’a expressément prononcée, en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce ; qu’il ne saurait toutefois faire obstacle à ce que le législateur fixe des règles assurant une répression effective des infractions ;

Considérant qu’en instituant une peine obligatoire directement liée à un comportement délictuel commis à l’occasion de la conduite d’un véhicule, l’article L. 234-13 du code de la route vise, aux fins de garantir la sécurité routière, à améliorer la prévention et renforcer la répression des atteintes à la sécurité des biens et des personnes provoquées par la conduite sous l’influence de l’alcool ;

Considérant que, si, conformément aux dispositions de l’article L. 234-13 du code de la route, le juge qui prononce une condamnation pour de telles infractions commises en état de récidive légale est tenu de prononcer l’annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis de conduire, il peut, outre la mise en œuvre des dispositions du code pénal relatives aux dispense et relevé des peines, fixer la durée de l’interdiction dans la limite du maximum de trois ans ; que, dans ces conditions, le juge n’est pas privé du pouvoir d’individualiser la peine ; qu’en conséquence, les dispositions de l’article L. 234-13 du code de la route ne sont pas contraires à l’article 8 de la Déclaration de 1789 ; » (Décision n° 2010-40 QPC du 29 septembre 2010)

L’annulation de plein droit du permis de conduire en matière de récidive d’alcool au volant est donc tout à fait constitutionnelle. On ne pourra que s’interroger sur la pertinence du raisonnement du Conseil constitutionnel mais il n’en demeure pas moins que la décision des sages de la rue Montpensier est sans appel…

La seule possibilité d’échapper à l’annulation de plein du permis de conduire résidera dans l’exploitation d’éventuels vices de procédure. Dans tous les autres cas, l’annulation sera prononcée, et comme l’a justement noté le Conseil constitutionnel, la principale variable sera la durée d’interdiction de solliciter un nouveau titre dont sera assortie l’annulation.

La période d'interdiction de solliciter un nouveau titre

Comme n’a pas manqué de le noter le Conseil constitutionnel cette période d’interdiction de repasser les examens du permis de conduire peut être plus ou moins longue. Tout dépendra de la sévérité du magistrat qui aura constaté l’annulation du titre. Signalons, toutefois, que contrairement à ce qui se dit parfois, il n’y a pas de durée minimale d’interdiction. Et la peine d’annulation peut parfaitement être prononcée sans être assortie d’une quelconque période d’interdiction.

En pratique le condamné devant, a minima, repasser l’épreuve théorique (le code) après avoir satisfait aux exigences de l’article L. 224-14 du code de la route (visite médicale et tests psychotechniques). Ainsi une annulation judiciaire du permis de conduire prononcée sans période d’interdiction de solliciter un nouveau titre, ne permettra pas, compte tenu du temps réclamés par ces démarches, de conduire quelques jours après la condamnation.

Il est important de souligner sur ce point que ne viendra pas se déflaquer de la période d’interdiction la privation de permis de conduire déjà effectuée au titre d’une suspension de permis de conduire.

L'Ethylotest anti-démarrage électronique obligatoire en matière de récidive d'alcool

L’EAD est un dispositif qui interdit le démarrage du véhicule en cas d’alcoolisation du conducteur. Son installation est faite par un centre agréé et le coût du dispositif est intégralement supporté par le conducteur.

Le cadre juridique lié à l’usage de l’EAD a été pensé pour éviter toute dérive et notamment le recours à un tiers pour souffler à la place du conducteur. Depuis la loi LOPPSI 2 de mars 2011, le législateur entend rendre obligatoire l’EAD pour tous les conducteurs condamnés pour récidive d’alcool au volant.

L’EAD ne sera imposé ou tout du moins proposé de façon (presque) systématique qu’à partir de 2020 avec les modifications apportées par la Loi LOM, la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités.

L’annulation est désormais systématiquement assortie d’une période plus ou moins longue au cours de laquelle la conduite n’est autorisée qu’avec un dispositif d’EAD.

Article L234-13 du Code de la route

« Toute condamnation (…) commise en état de récidive (…) donne lieu de plein droit à l’annulation du permis de conduire avec interdiction de conduire un véhicule qui ne soit pas équipé par un professionnel agréé ou par construction d’un dispositif homologué d’anti-démarrage par éthylotest électronique pendant une durée de trois ans au plus, applicable à compter de la date d’obtention d’un nouveau permis de conduire ; cette interdiction ne s’applique cependant pas si ce nouveau permis a été obtenu plus de trois ans après l’annulation du précédent…»

On notera que l’EAD n’est pas systématique puisque la loi LOM ne le rend obligatoire que pour les conducteurs récidivistes ayant retrouvé un permis depuis moins de trois ans.

En pratique le condamné devant, a minima, repasser l’épreuve théorique (le code) après avoir satisfait aux exigences de l’article L. 224-14 du code de la route (visite médicale et tests psychotechniques). Ainsi une annulation judiciaire du permis de conduire prononcée sans période d’interdiction de solliciter un nouveau titre, ne permettra pas, compte tenu du temps réclamés par ces démarches, de conduire quelques jours après la condamnation.

Il est important de souligner sur ce point que ne viendra pas se déflaquer de la période d’interdiction la privation de permis de conduire déjà effectuée au titre d’une suspension de permis de conduire.

La confiscation du véhicule

Depuis la loi LOPSSI 2 de 2011, le législateur a prévu la confiscation du véhicule en présence de certains délits routiers. L’alcool au volant en état de récidive légal entraîne la confiscation. Cette confiscation est dite obligatoire. Mais la confiscation présente un caractère moins obligatoire que l’annulation du permis puisque le magistrat peut écarter la confiscation en motivant sa décision.

Au delà même des cas de récidive, la loi d’orientation des mobilités du 24 décembre 2019 est venue étendre les possibilités de confiscation pour des délits de conduire sous l’empire d’un état alcoolique, conduite après usage de stupéfiants…

Le risque de confiscation en matière de récidive ne doit donc pas être perçu comme théorique et devra faire partie intégrante de la préparation de l’audience.

A noter qu’en cas de condamnation et de non confiscation du véhicule, les frais de fourrière seront portés à la charge du conducteur. 

A propos de confiscation véhicule, on rappellera brièvement que le tribunal ne peut confisquer qu’un véhicule dont le condamné est propriétaire. Contrairement à ce qui est souvent conseillé, établir un certificat au nom d’un tiers ne permet pas forcément d’éviter tout risque de confiscation. Le certificat d’immatriculation n’est, en effet, pas un titre de propriété mais un simple titre de circulation.