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PV / Infraction au Code de la route : suis-je obligé de désigner le véritable conducteur en 2024 ?

PV / Infraction au Code de la route : suis-je obligé de désigner le véritable conducteur en 2024 ?

En cas de constatation d’une infraction sans interception par un radar automatique ou à la volée, un avis de contravention est envoyé au propriétaire du véhicule. Celui-ci est-il ou non obligé de désigner le conducteur au moment des faits ? Le Code de la route prévoit-t-il des sanctions ou non pour celui qui refuse de dénoncer le conducteur ? Maître Jean-Baptiste le Dall, Avocat à la Cour, Docteur en droit, répond à ces questions et vous explique ce qu’il se passe, jurisprudence récente à l’appui, en en l’absence de dénonciation ou en cas de désignation erronée.

Obligation de désignation du conducteur PV excès de vitesse
Pas d’obligation de désignation du conducteur même en cas de grand excès de vitesse !

Une désignation impossible en cas de contrôle routier

La possibilité de désigner le véritable conducteur au volant au moment de l’infraction ne sera offerte au titulaire du certificat d’immatriculation qu’en l’absence d’interception du véhicule en infraction.

Le conducteur en infraction qui aurait été arrêté par les forces de l’ordre et recevrait quelques jours après un avis de contravention à son domicile ne pourra, bien sûr, pas désigner une autre personne que lui. Cette désignation serait évidemment mensongère, mais la possibilité ne lui est tout simplement pas offerte car les agents verbalisateurs ont relevé son identité lors de la constatation de l’infraction.

Une désignation possible en cas de PV à la volée ou de verbalisation par radar automatique

En l’absence d’interception du véhicule en infraction, un avis de contravention sera envoyé au domicile du titulaire du certificat d’immatriculation. Plusieurs options possibles s’offrent au titulaire du certificat d’immatriculation. Il peut commencer par payer l’amende relative à cette infraction pour bénéficier du tarif minoré. Attention en procédant à ce paiement, le destinataire de l’avis de contravention reconnaît sa culpabilité et cette verbalisation entraînera une décision de retrait de points sur son permis de conduire.

Le titulaire du certificat d’immatriculation peut ensuite vouloir contester, non pas être l’auteur des faits, mais les conditions de constatation de l’infraction. On pense, par exemple, à une limitation de vitesse erronée. Dans ce cas, le destinataire de l’avis de contravention exposera ses motifs de contestation dans un courrier ou directement sur le site de l’ANTAI et cochera la case numéro trois « autres motifs » du formulaire d’exonération.

Dans cette hypothèse, le destinataire de l’avis de contravention devra également verser une consignation.

Le titulaire du certificat d’immatriculation peut également vouloir contester la verbalisation car il n’était pas au volant au moment des faits et vouloir désigner le véritable coupable de l’infraction. Pour ce faire, il utilisera le formulaire de requête en exonération et indiquera l’identité ainsi que les références de permis de conduire du conducteur en infraction. Celui-ci recevra à son tour un avis de contravention qu’il pourra d’ailleurs choisir de contester. Dans l’hypothèse d’une désignation du conducteur en infraction, le titulaire du certificat d’immatriculation n’aura pas à verser de consignation.

Enfin, le titulaire du certificat d’immatriculation peut ne pas avoir été au volant au moment des faits mais ne pas être en mesure de savoir qui conduisait son véhicule à ce moment-là. Il devra alors contester la verbalisation. Sur le formulaire de requête en exonération, il cochera la case numéro 3 « autres motifs » et indiquera dans son courrier de contestation être certain de ne pas avoir été au volant ou au guidon au moment des faits mais ne pas pouvoir désigner un conducteur.

Pas d’obligation de désignation pour les particuliers

Le Code de la route ne prévoit en aucun cas d’obligation pour les particuliers titulaires d’un certificat d’immatriculation de procéder à la désignation d’un conducteur. Le Code de la route prévoit toutefois pour eux un mécanisme de responsabilité financière sans perte de point. Aucune sanction pénale n’est prévue dans le cas où un particulier ne pourrait pas ou même refuserait de donner le nom du conducteur au volant ou au guidon au moment de l’infraction. Attention on soulignera que généralement l’application du dispositif de responsabilité pécuniaire prévu aux dispositions de l’article L.121-3 du Code de la route entraîne une augmentation du montant de l’amende.

Désignation obligatoire en cas d’infraction commise avec un véhicule de société ou appartenant à une personne morale

Contrairement aux véhicules de particuliers, le Code de la route prévoit une obligation de désignation du responsable de l’infraction lorsque celle-ci a été commise au volant ou au guidon d’un véhicule appartenant à une personne morale. Seront concernés les véhicules appartenant à une entreprise, les véhicules de location ou encore les véhicules immatriculés au nom d’une association ou d’une fédération.

Les dispositions de l’article L. 121-6 du Code de la route, prévois ainsi que :

Lorsqu’une infraction constatée selon les modalités prévues à l’article L. 130-9 a été commise avec un véhicule dont le titulaire du certificat d’immatriculation est une personne morale ou qui est détenu par une personne morale, le représentant légal de cette personne morale doit indiquer, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou de façon dématérialisée, selon des modalités précisées par arrêté, dans un délai de quarante-cinq jours à compter de l’envoi ou de la remise de l’avis de contravention, à l’autorité mentionnée sur cet avis, l’identité et l’adresse de la personne physique qui conduisait ce véhicule, à moins qu’il n’établisse l’existence d’un vol, d’une usurpation de plaque d’immatriculation ou de tout autre événement de force majeure.

Les dispositions du premier alinéa du présent article sont applicables lorsque l’infraction a été commise avec un véhicule dont le titulaire du certificat d’immatriculation ou le détenteur est une personne physique ayant immatriculé le véhicule en tant que personne morale ; l’obligation prévue au même premier alinéa est alors réputée satisfaite si le titulaire du certificat d’immatriculation ou le détenteur du véhicule justifie, dans le même délai et selon les mêmes modalités, que le véhicule est immatriculé à son nom.

Le fait de contrevenir au présent article est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe.

Article L. 121-6 du Code de la route

Dans la pratique lorsqu’une infraction est commise au volant ou au guidon d’un véhicule immatriculé au nom d’une personne morale, un avis de contravention est envoyé à son représentant légal. L’avis de contravention mentionne l’infraction qui a été relevée ainsi que l’obligation de procéder à la désignation du conducteur. En l’absence de désignation du conducteur, c’est un nouvel avis d’infraction qui sera alors émis pour une nouvelle contravention : la non-désignation du conducteur.

La chambre criminelle précise bien que cette infraction de non désignation est distincte de l’infraction ayant déclencher l’injonction de désignation :

8. Il résulte de ce texte que, lorsqu’une infraction constatée selon les modalités prévues à l’article L.130-9 du code de la route a été commise avec un véhicule dont le titulaire du certificat d’immatriculation est une personne morale ou qui est détenu par une personne morale, le représentant légal de cette dernière doit, à moins qu’il établisse l’existence d’un vol, d’une usurpation de plaque d’immatriculation ou de tout autre événement de force majeure, indiquer à l’autorité mentionnée sur l’avis de contravention qui lui a été adressé, dans un délai de quarante-cinq jours à compter de l’envoi ou de la remise de cet avis, l’identité, l’adresse et la référence du permis de conduire de la personne physique qui conduisait ce véhicule, y compris lorsqu’il s’agit du représentant légal lui-même.

9. Pour relaxer la personne morale poursuivie, le jugement attaqué retient que la citation ne comporte aucune mention ni sur la vitesse mesurée ni sur la vitesse retenue et qu’aucun élément ne permet au juge de contrôler la matérialité de l’infraction, les seuls éléments versés en procédure étant les avis de contraventions des 9 mars et 18 février 2022.

10. Le juge ajoute qu’en conséquence l’infraction d’excès de vitesse, support de l’infraction de non-transmission de l’identité du conducteur, censée en procéder, n’est pas établie.

11. En se déterminant ainsi, alors, en premier lieu, que les contraventions initiales, ici les excès de vitesse, sont distinctes des contraventions poursuivies et, en second lieu, qu’il n’est pas contesté que les avis de contravention d’excès de vitesse, figurant au dossier du tribunal, ont été expédiés, le tribunal a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.

12. D’où il suit que la cassation est encourue.

Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 septembre 2024, n°23-85608

Désignation du conducteur : la chambre criminelle très exigeante

Confrontés à des amendes particulièrement dissuasives en cas de non désignation (amende forfaitaire de 675 euros qui grimpe à 1875 euros en cas d’amende forfaitaire majorée), certains représentants légaux pourraient être tentés de désignation un conducteur non fautif.

De même, certains justiciables peuvent se laisser tenter et céder aux propositions alléchantes mais illégales qui s’étalent à longueur de journée sur des réseaux sociaux (comme Snapchat notamment) et dénoncer faussement un conducteur dont l’identité aurait été usurpée.

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PV : attention aux fausses désignations de conducteurs sur Snapchat ou sur le web !

Mais la Cour de cassation se montre particulièrement sévère en l’absence d’aboutissement de la procédure de désignation ou tout du moins lorsque celle-ci n’aboutit pas à l’établissement de la culpabilité d’un conducteur.

C’est ce que montre un récent arrêt du 10 septembre 2024 :

Vu les articles L. 121-3 du code de la route et 593 du code de procédure pénale :

8. Selon le premier de ces textes, le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule est redevable pécuniairement de l’amende encourue pour la contravention de non-port de la ceinture de sécurité, à moins qu’il n’établisse l’existence d’un vol ou de tout autre événement de force majeure, ou qu’il n’apporte tous éléments permettant d’établir qu’il n’est pas l’auteur véritable de l’infraction.

9. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.

10. Pour renvoyer Mme [F] des fins de la poursuite dirigée contre elle en qualité de redevable pécuniaire de l’amende encourue, le jugement attaqué énonce que la prévenue a communiqué des informations sur l’état civil et le permis de conduire de M. [M], personne qu’elle a désignée comme conduisant son véhicule au moment des faits, dont l’exactitude n’a pas été remise en cause par le ministère public, ce qui rend sa désignation crédible, au contraire de celle de M. [S] par M. [M] qui n’a communiqué ni l’adresse de celui-ci au Mali ni les indications relatives à son permis de conduire.

11. Le juge ajoute que le ministère public aurait dû faire citer à comparaître à la fois Mme [F] et M. [M] afin de permettre un débat contradictoire devant le tribunal et qu’en cet état, il y a lieu de relaxer Mme [F] au bénéfice du doute.

12. En se déterminant ainsi, le tribunal n’a pas justifié sa décision.

13. En effet, il s’est limité à une appréciation de la vraisemblance des affirmations de la prévenue selon lesquelles elle n’est pas l’auteure de l’infraction, alors que celle-ci n’a apporté aucun élément de preuve corroborant ses dires, le fait qu’un doute subsiste sur son implication dans les faits n’étant pas de nature à écarter la responsabilité pécuniaire au titre de laquelle elle est uniquement recherchée.

14. La cassation est par conséquent encourue.

Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 septembre 2024, n°23-87155

Pas de présomption de culpabilité du titulaire du certificat d’immatriculation

La chambre criminelle de la Cour de cassation répète régulièrement que le mécanisme de responsabilité pécuniaire prévu aux dispositions de l’article L 121-3 du Code de la route ne constitue aucunement une présomption de culpabilité pour le propriétaire du véhicule.

 « le code de la route n’a institué à l’égard des propriétaires ou locataires de véhicules, relativement à la contravention d’inobservation de l’arrêt imposé par un feu de signalisation, aucune présomption légale de culpabilité, mais seulement une responsabilité pécuniaire à moins qu’ils n’établissent qu’ils ne sont pas les auteurs véritables de l’infraction ; »

Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 mai 2016, n°14-86931

A lire ou à relire :

Article L 121-3 du Code de la route : la responsabilité pécuniaire ou financière du titulaire du certificat d’immatriculation

Le titulaire n’a pas à prouver qu’il n’est pas l’auteur de l’infraction.

Encore récemment, la Cour de cassation est venue préciser :

Vu l’article L. 121-3 du code de la route :

5. Selon ce texte, si le titulaire du certificat d’immatriculation d’un véhicule est redevable pécuniairement de l’amende encourue pour les contraventions à la réglementation sur les vitesses maximales autorisées, à moins qu’il n’établisse l’existence d’un vol ou de tout autre événement de force majeure ou qu’il n’apporte tous éléments permettant d’établir qu’il n’est pas l’auteur véritable de l’infraction, la personne déclarée redevable en application de ces dispositions n’est pas responsable pénalement de l’infraction.

6. M. [G], titulaire du certificat d’immatriculation d’un véhicule qui a été contrôlé le 8 septembre 2021, pour un excès de vitesse inférieur à 20 km/h, a été poursuivi en la seule qualité de pécuniairement redevable de l’amende encourue pour cette contravention.

7. Le tribunal l’a déclaré coupable d’excès de vitesse, au motif qu’il résultait des éléments du dossier et des débats, qu’il avait bien commis les faits lui étant reprochés.

8. En prononçant ainsi, le tribunal a méconnu le sens et la portée du texte susvisé.

9. D’où il suit que la cassation est encourue.

Cour de cassation, Chambre criminelle, 24 septembre 2024, n°24-80469

Mais on rappellera que le titulaire du certificat d’immatriculation aura tout intérêt à tenter de prouver son innocence. En effet, s’il parvient à prouver sa présence ailleurs que sur les lieux de l’infraction, le propriétaire pourra éluder l’amende civile.

Obligation de désignation pour les grands excès de vitesse ?

Les principes exposés précédemment en matière de contravention de quatrième classe et d’amende forfaitaire s’appliquent également en matière de contravention de cinquième classe et notamment de grand excès de vitesse supérieur ou égal à 50 km/h au-delà de la limitation de vitesse.

Dans l’hypothèse d’un grand excès de vitesse relevé sans interception, le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule en infraction ne recevra pas d’avis de contravention. Il sera par contre convoqué par les forces de l’ordre pour une audition. Au cours de celle-ci, les agents interrogeront le titulaire du certificat d’immatriculation. Ils commenceront par lui demander s’il était au volant ou au guidon au moment des faits. Si tel n’est pas le cas, il sera demandé au propriétaire du véhicule de donner l’identité du coupable. Mais même dans l’hypothèse d’un grand excès de vitesse, il n’existe aucune obligation pour le titulaire de certificat d’immatriculation de désigner l’auteur des faits.

Les agents en charge de l’audition pourront parfois questionner le titulaire du certificat d’immatriculation pour lui faire donner un nom ou lui faire reconnaître les faits. Ils pourront parfois effrayer le propriétaire du véhicule en faisant miroiter la perspective d’une convocation en justice inquiétante. Mais rappelons aux justiciables qu’aveux ou pas, la constatation d’un grand excès de vitesse entraînera toujours un traitement judiciaire sous une forme ou sous une autre : audience publique devant le Tribunal de police ou ordonnance pénale.

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